Le Lynx, Une présence discrète

Le lynx présent en France est le Lynx boréal (Lynx lynx). Son aire de répartition est la plus large de tous les félins : on le trouve de l’Europe de l’Ouest jusqu’à l’extrême Orient. Entre le 17ème et le début du 20ème siècle, sa population régresse, jusqu’à disparaitre des pays d’Europe de l’Ouest, dont la France. Dans le massif des Alpes, l’espèce se maintient un peu plus longtemps, jusqu’en 1928 lorsque le dernier individu aurait été tué. Les raisons de sa disparition : le déboisement, la diminution des populations de ses proies et la chasse.

Le lynx réapparait en France dans les années 1970. D’abord réintroduit en Suisse, il franchit la frontière et recolonise le Jura et les Alpes. Son retour dans le massif jurassien est attesté en 1974 lorsqu’un individu est tué sur les hauteurs de Thoiry (commune aujourd’hui pour partie en Réserve naturelle). L’espèce est désormais présente dans la quasi-totalité du massif jurassien. La Réserve naturelle de la Haute Chaîne du Jura joue un rôle important dans la dispersion de l’espèce, puisqu’elle constitue un corridor essentiel entre le nord du massif alpin et le sud du massif jurassien.

Ce fascinant félin est une espèce discrète, vivant en faible densité sur de grands territoires, et comme tous les grands carnivores, le lynx est difficile à observer.

Reconnaître un Lynx boréal
> 50 à 75 cm au garrot, 85 à 130 cm de long
> Entre 18 et 25 kg
> Un pelage entre le gris-jaune et le roux, des taches sombre sur le corps, des oreilles pointues terminées par des pinceaux noirs, une queue très courte terminée par un manchon noir
Plus de précisions ici

D’autres espèces de lynx à travers le monde :
> Lynx pardelle (Lynx pardinus)
> Lynx roux (Lynx rufus)
> Lynx du Canada (Lynx canadensis)

Carte d'identité

Début de la campagne de réintroduction du Lynx boréal en Suisse

Retour attesté de l'espèce en France

Programme de réintroduction du Lynx sur 10 ans, en 2 phases, dans le massif des Vosges

1er suivi du félin par piégeage photographique à l'échelle du massif jurassien français

Mise en place des suivis par piégeage photographique intensif sur la Réserve naturelle, tous les 2 ans

Le Lynx boréal est intégré au 3ème plan de gestion de la Réserve naturelle en tant qu'espèce à enjeux

Lancement du 1er Plan National d'Actions (PNA) Lynx

1972
1974
1983
2012
2015
2020
2022

État de la population

Le lynx est un animal territorial. Son territoire s’étend sur de vastes surfaces. Les femelles occupent des domaines vitaux allant de 90 à 180 km² en moyenne, et les mâles de 150 à 300 km², superposant ainsi ceux de plusieurs femelles.

Le noyau principal est localisé dans le massif jurassien, mais il se disperse également dans les massifs montagnards des Vosges et des Alpes. La consolidation de sa présence, notamment dans le massif jurassien, permet l’augmentation de son aire de présence dite régulière. Celle-ci était estimée en 2023 à 15 800 km².

Le nombre de Lynx en France n’est pas réellement connu, car cette espèce fragile ne dispose pas aujourd’hui d’un programme d’estimation de son effectif dans le pays. Des suivis, plus sectorisés, permettent tout de même d’estimer localement les densités de populations. Un suivi mis en place dans le Jura français, entre 2011 et 2014, fait ressortir une densité moyenne d’environ 1 individu pour 100 km², avec néanmoins d’importantes variations locales.

France

Sont estimés en 2022 environ 200 lynx sur le territoire français, répartis en 3 noyaux principaux : le Jura, les Vosges et les Alpes

Massif jurassien (franco-suisse)

Le massif jurassien regroupe 90% de la population nationale de lynx. la préservation de l’espèce dans la région est primordiale

Réserve naturelle

Lors du dernier suivi lynx par photo-piégeage en 2023, 4 individus ont été identifiés comme utilisant et traversant le territoire de la Réserve naturelle

Suisse

En 2021, la Suisse estime sur son territoire environ 291 lynx indépendants (subadultes et adultes), dont 69 dans le Jura et 222 dans les Alpes

Des menaces toujours présentes

La collision avec les véhicules est une cause de mortalité importante, notamment chez les jeunes individus. Elles représentent 58 % des cas de mortalité détectés. 

Parmi les autres facteurs impactant les populations de Lynx et affectant la viabilité et la survie de l’espèce, peuvent être cités, les tirs illégaux, les maladies, mais aussi la fragmentation des habitats. Ce dernier est un élément limitant, voire bloquant les échanges entre individus, et à terme, ces isolements peuvent entraîner un affaiblissement génétique conséquent de la population. Dans ce contexte, l’acquisition de connaissances (génétique, dérangement …) et le suivi des populations (zones de présence, corridors …) prennent toute leur importance.

Statut de protection

Le Lynx boréal est une espèce protégée au niveau national et international :
> La Convention de Berne (relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel en Europe), citée à l’annexe III (espèces protégées)
> La Convention CITES (relative à la commercialisation des espèces faunes et flores menacées d’extinction), citée aux annexes A
> La Directive européenne 92/43/CEE (dite Directive Habitat-Faune-Flore) annexes II (protection de l’habitat) et IV (protection stricte de l’espèce sur le territoire européen)
> La liste des espèces de vertébrés protégées menacées d’extinction en France et dont le territoire excède le territoire d’un département, cité à l’article 1
> La liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire français, cité à l’article 2
> Classé « En danger » par l’UICN sur la liste des espèces menacées de France

En 2017, le Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) considérait la tendance de la population come étant en baisse. Depuis 2022, le Lynx boréal fait l’objet d’un PNA. L’objectif est de réduire les menaces qui pèsent sur cette espèce, notamment par la sensibilisation des habitants des régions concernées, afin d’aider à l’acceptation de sa présence.

Pour cette espèce, aucun tir dérogatoire de prélèvement ou d’effarouchement n’est autorisé.
Toute destruction illégale de l’espèce est passible de 36 mois d’emprisonnement et de 150 000€ d’amende.

Suivis & Actions

Depuis 2020, le troisième plan de gestion de la Réserve naturelle, compte le Lynx boréal parmi ses 5 espèces à enjeux ciblées. L’objectif est de pérenniser la présence de cette espèce sur la Réserve naturelle. A ce titre, des actions sont mises en place afin de :

  • Maintenir les connexions écologiques favorables à l’espèce
  • Limiter les risques de collision sur les axes routiers de la Réserve naturelle
  • Améliorer les échanges avec les acteurs concernés par l’espèce
  • Poursuivre le suivi du lynx (photo-piégeage intensif, recherche d’indices de présence, bioacoustique en période de rut, …)

Pour mener à bien ces suivis, la Réserve naturelle s’appuie sur un réseau de bénévoles et de professionnels (ONF, PNR du Haut Jura, Pays de Gex Agglo, …), ainsi que sur des partenaires scientifiques (OFB, Kora (Ch), SFEPM et membres du Conseil scientifique).

En savoir plus

PIÉGEAGE photographique

Depuis plusieurs années, l’espèce est suivie en Suisse et en France via un protocole de photo-piégeage intensif, permettant d’identifier les individus grâce aux motifs de leur pelage.

En 2012, un premier suivi par pièges photographiques du Lynx boréal a été mis en place à l’échelle du massif jurassien. À cette époque, la Réserve naturelle était simple partenaire dans le suivi et seule sa partie nord était concernée. À partir de 2015, la Réserve naturelle prit l’initiative, avec l’appui de l’OFB-CNERA, de développer ce suivi sur l’ensemble de son territoire, et de le réaliser tous les deux ans. L’objectif est de mieux connaître les déplacements, la reproduction, le nombre d’individus territorialisés et les habitudes des individus fréquentant la Réserve naturelle.

INDICES de présence

Lors de leurs missions de terrains (tournées de surveillance et suivis scientifiques), les agents de la Réserve naturelle sont amenés à relever des indices de présence de l’espèce. Cela peut aussi se faire sous forme de prospections ciblées sur des secteurs précis et pendant des périodes clés.

Les indices relevés sont des empreintes, des carcasses de proies, des crottes ou des observations directes. Ces indices viennent compléter les informations obtenues lors des suivis par photo-piégeage et permettent de mieux connaître la façon dont la population de Lynx boréal occupe le territoire.

La Réserve naturelle est un membre actif du Réseau Loup-Lynx (OFB-DDT).

AUTRES suivis

Dans le cadre d’un projet porté par la SFEPM (Société Française pour l’Étude et la Protection des Mammifères), des analyses sur la génétique et le régime alimentaire du lynx sont par ailleurs réalisées par le laboratoire Chrono-environnement sur des prélèvements de fèces effectués en Réserve naturelle. Ces analyses permettent de collecter des informations sur la présence et les déplacements de certains individus. Ils aident également à étoffer la base de données utile aux analyses de viabilité de l’espèce.

Lynx & Activités humaines

52Unités pastorales au sein de la Réserve naturelle.
4000Bêtes environ mises à l'estive chaque année dans le Réserve naturelle. Il s'agit majoritairement de bovin, et seulement quelques troupeaux d'ovins.
0Attaque sur troupeau domestique sur le territoire de la Réserve naturelle, depuis 2019.

Le lynx est un animal strictement carnivore. Il se nourrit principalement d’ongulés (chevreuils, chamois, voire jeunes cerfs), de renards, de lièvres, d’oiseaux, ou encore de rongeurs. Si les espèces prédatées sont très majoritairement sauvages, on peut rencontrer quelques cas d’attaques sur animaux domestiques (ovins, caprins, voire volailles). En 2024, 5 constats de prédation de Lynx ont été effectués dans le département de l’Ain, et 38 dans le département du Jura.

Malgré une relativement bonne acceptation du prédateur dans notre société, des cas de destructions illégales sont toujours à déplorer. Depuis son retour en France, une 15aine de cas ont été recensés, dont 3 en 2020 dans les Vosges et le Jura. Ces destructions peuvent entraîner le déclin de la population et ainsi porter préjudice à cette espèce toujours menacée.

La protection des troupeaux

Avec son retour en 1974, différentes mesures de protection ont été mise en place afin de limiter considérablement l’impact du lynx sur les troupeaux : installation de clôture électriques, présence des chiens de protection, mise en place de parcs de regroupement et gardiennage renforcé (berger).

Le chien de protection

Le chien de protection

Souvent appelés « Patou », il existe en France plusieurs races de chiens de protection : le Patou (ou Montagne des Pyrénées), le Berger des Abruzzes, ou encore le Kangal.

La présence de ces chiens se révèlent aujourd’hui être l’un des meilleurs moyens pour limiter les attaques. Sur la Haute Chaîne du Jura, deux alpages sont concernés par leur présence : l’alpage du Crozat, du côté du Col de la Faucille, en limite de la Réserve naturelle et l’alpage de Curson-Calame, situé lui en son cœur, du côté du Reculet et du Crêt de la Neige.

Sur ces deux secteurs, les sentiers de randonnée principaux ont fait l’objet de modifications de tracés pour une meilleure cohabitation entre l’activité touristique et agricole et plus de sérénité pour les bergers qui travaillent aux côtés des chiens et des troupeaux.

En ce sens, les usagers de la Réserve naturelle sont invités à respecter les propriétés ainsi que les activités d’autrui, et a adopter les bons comportements en cas de rencontre avec des chiens de protection.

Plus d’informations sur le pastoralisme et les chiens de protection sur la page de la DREAL AURA et celle de Kesako-Pasto.

En cas d'attaque sur troupeau

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L’Office Français de la Biodiversité (OFB),
averti par la DDT, reprendra contact avec
vous pour réaliser le constat de dommage.

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Du matériel de renforcement de protection
peut être rapidement mis à disposition des
exploitations touchées par la prédation :
> la DDT : 04 74 50 67 86 ou
ddt-saf-seaf@ain.gouv.fr
> la Réserve naturelle nationale de la Haute
Chaîne du Jura : 04 50 41 29 65 ou
contact@rnn-hautechainedujura.fr

En cas de rencontre

S’agissant d’une espèce solitaire vivant sur de grands territoires, le lynx est un animal discret qu’il est rare de rencontrer. Il ne présente pas de risque pour l’humain, et aucune attaque sur l’Homme n’a été recensée en France au cours de l’histoire. Cependant, en cas de rencontre, il est important de ne pas chercher à interagir avec le félin (comme avec toute autre espèce de la faune sauvage). Le comportement à adopter est le même que pour le loup, n’hésitez pas à consulter notre flyer.